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<title>HOMINIDÉS</title>
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<body>
<h1><span>HOMINIDÉS</span></h1>
<h2 class="Source">par RICQLES Armand de,<br />
docteur ès sciences, professeur de l'université de Paris-VII</h2>
<p class="paragraphe1">
L’étude de nos origines a connu, dans les années soixante-dix, de considérables bouleversements : les nombreux
et exceptionnels témoignages apportés par les fouilles d’Afrique (Afrique du Sud, Éthiopie, Kenya et Tanzanie),
d’Asie (Chine, Israël, Turquie) et d’Europe (France, Grèce) ont permis de clarifier un peu l’histoire de l’homme
et de ses parents fossiles. Il faut rappeler ici que les Hominidés (famille regroupant les hommes actuels et
fossiles) appartiennent au monde animal ; ce sont des Vertébrés, Mammifères placentaires, classés dans l’ordre
des Primates. Ces derniers apparaissent à la limite des ères secondaire et tertiaire (vers 70 millions d’années,
Ma) comme d’ailleurs les autres grands mammifères, et l’homme partage une grande partie de son histoire avec les
singes, dont il s’est peut-être isolé au cours d’une période comprise entre 15 et 5 Ma. Les découvertes de la
biologie moléculaire et de la paléontologie ne s’accordent pas encore parfaitement sur ce point.
L’origine des Hominidés doit donc être probablement recherchée dans les terrains miocènes. Les premiers membres
de cette famille, les Australopithèques sont connus entre 7 et 1 Ma puis, aux alentours de 2 Ma (peut-être un
peu plus tôt) en Afrique ; Homo habilis (Homme habile), premier homme, prendra le relais pour venir jusqu’à
nous, Homo sapiens sapiens (homme sage et savant), Homo erectus (homme redressé) et les premiers Homo sapiens
ayant assuré les stadesintermédiaires.
</p>
<ol>
<li>L’origine lointaine : entre 20 et 8 millions d’années</li>
<h3>
De cette époque, on connaît quatre formes principales qui font toujours l’objet de discussions animées : le
Dryopithèque (singe des chênes), l’Ouranopithèque (singe de la pluie), le Sivapithèque (singe du dieu Siva)
et le Ramapithèque (singe du dieu Rama).
</h3>
<ul>Le Dryopithèque et l’Ouranopithèque</ul>
<p>
Le premier, connu en France, en Espagne, en Ouganda et dans quelques gisements asiatiques, est très
nettement engagé dans la voie des grands singes comme le prouvent : l’arcade dentaire upsiloïde de sa
mandibule, la morphologie générale de son crâne, les incisives et les canines assez grandes et la première
prémolaire inférieure monocuspide (à un seul tubercule) et sectoriale (coupante).
Le squelette post-crânien témoigne, d’autre part, d’un déplacement quadrupède. Ainsi, bien que le
Dryopithèque ait été longtemps reconnu comme la souche commune aux grands singes et aux Hominidés, il est
beaucoup trop spécialisé dans la voie des grands singes pour être considéré comme l’un de nos ancêtres, même
lointain.
L’Ouranopithèque (Ouranopithecus macedoniensis), découvert en 1974 dans le ravin de la Pluie en Macédoine,
présente des caractères morphologiques très particuliers qui l’isolent des Dryopithèques : les rangées
dentaires sont divergentes vers l’arrière, les canines petites et non tranchantes et la première prémolaire
inférieure monocuspide, et non sectoriale. Cette dernière remarque est très importante, car les caractères
de la première prémolaire inférieure ont souvent été utilisés comme repères phylétiques. Or, Yves Coppens a
montré en 1977 qu’une dent monocuspide n’est pas forcément sectoriale, comme on avait tendance à le croire ;
il y aurait, en fait, plusieurs types de monocuspidies qui auraient pu aboutir à plusieurs types de
bicuspidies.
Cet Ouranopithèque aurait évolué pour donner le Primate géant de Chine, de l’Inde et du Pakistan : le
Gigantopithèque, connu entre 11 et 2 Ma et qui se distingue par une mandibule haute et massive, des
incisives et des canines très faibles et une première prémolaire inférieure bicuspide adaptée au broyage.
</p>
<ul>Le groupe des Ramapithèques-Sivapithèques</ul>
<p>
La face du Ramapithèque se raccourcit, la hauteur de sa canine ne dépasse pas celle de la rangée
prémolaire-molaire ; les dents antérieures par rapport aux dents latérales se développent ; leur émail est
plus épais, et l’arcade dentaire a la forme d’un V très ouvert, mais pas franchement parabolique comme c’est
le cas chez l’homme. La première prémolaire inférieure est monocuspide et non tranchante (« semi-sectoriale
à submolariforme » pour D. Pilbeam).
Le Sivapithèque présente une forte canine, un palais peu profond, une première prémolaire coupante. Une face
découverte lors d’une campagne du Geological Survey of Pakistan Harvard Peabody Museum Project dans les
Siwaliks (Pakistan) en 1979 a conduit D. Pilbeam à considérer le Sivapithèque comme un ancêtre des
orangs-outans : notamment, l’orbite, le palais et les fragments de crâne seraient très proches de ceux des
grands singes asiatiques.
Signalons qu’une autre face de Sivapithèque a été mise au jour en 1979 dans le site de Lufeng en Chine et
présente également de fortes ressemblances avec les orangs-outans.
Certains auteurs relient le Ramapithèque aux Australopithèques plio-pléistocènes, premiers Hominidés vrais,
connus dès 6 Ma. En 1980, lors du VIIIe congrès de la Société internationale de primatologie, une présession
avait été consacrée aux Primates hominoïdes et aux ancêtres des Hominidés ; le sentiment qui avait prévalu
était que l’ensemble Ramapithèque-Sivapithèque était peut-être l’ancêtre des Pongidés et des Hominidés.
Lors d’une réunion à Rome, en 1982, ce même ensemble devenait peut-être l’ancêtre des orangs-outans en Asie
et des Pongidés africains en Afrique, comme le pressentait le paléontologue anglais P. Andrews.
Paradoxalement, entre 10 et 4 Ma, il n’y a que très peu de pièces fossiles connues : une molaire découverte
à N’Gorora (Kenya, 9 Ma) est attribuée à Sivapithecus , une autre molaire provenant de Lukeino (Kenya, 6,5
Ma) et un fragment de mandibule portant une molaire trouvée à Lothagam (Kenya, 5,5 Ma) sont rapportés à
Australopithecus .
En août 1982, H. Ishida et R. Leakey annonçaient la découverte du maxillaire supérieur d’un primate
hominoïde dans les Samburu Hills au Kenya. Il serait provisoirement daté de 8 Ma.
L’épaisseur de l’émail de ces primates miocènes ainsi que la faune suggèrent une végétation de savane,
milieu plus découvert, qui a peut-être favorisé l’acquisition d’une bipédie ainsi que le développement du
cerveau. Par la suite, de nouvelles découvertes ont été réalisées et viennent affiner un certain nombre de
données. Notamment, la révision du genre Kenyapithecus conduit M. Pickford à penser que ce primate pourrait
être l’ancêtre de lignée qui mène aux grands singes actuels d’Asie et de celle qui conduisit aux grands
singes d’Afrique et aux Hominidés.</p>
<ul>Biochimie et chromosomes</ul>
<p>
Complémentaire de la paléontologie, la biologie moléculaire et chromosomique étudie les composants
biochimiques (structures des protéines, en particulier) des cellules des animaux actuels et compare les
chromosomes entre eux. Les différences ou les ressemblances permettent d’envisager des parentés. Les
recherches récentes établissent une évolution biochimique et une véritable évolution chromosomique.
Les protéines sont des associations en chaîne, dans un ordre déterminé, de briques élémentaires, les acides
aminés. Au sein d’un même groupe, les chaînes sont assez constantes, mais elles varient entre les groupes
animaux. Ces différences sont recensées pour isoler les divers groupes.
Actuellement, les données biochimiques (hémoglobine b, par exemple), immunologiques ou chromosomiques sont
relativement cohérentes : l’homme et le chimpanzé sont deux très proches parents. Ils auraient 99 p. 100 de
leur matériel génétique en commun.
Certains auteurs (V. Sarich, M. Goodman, en particulier) ont tenté d’établir de véritables horloges
moléculaires et proposé une séparation entre le chimpanzé et l’homme datant de 5 Ma pour l’un et beaucoup
plus ancienne pour l’autre.
Ces méthodes permettent d’évaluer les parentés mais non l’ancienneté, et la paléontologie garde là un rôle
essentiel et irremplaçable. J. Lowenstein a proposé les premiers résultats d’une étude immunologique mettant
en évidence les réactions protéiniques entre espèces fossiles et actuelles. À partir de fragments osseux de
représentants du groupe Ramapithèque-Sivapithèque, les résultats obtenus montrent une affinité avec les
orangs-outans, les gorilles et les gibbons. Ces résultats préliminaires sembleraient confirmer ceux de la
paléontologie.</p>
<li>Les Australopithèques</li>
<h3>
Premiers Hominidés reconnus unanimement, les Australopithèques (singes du Sud) ont peuplé l’Afrique de l’Est
(Éthiopie, Kenya et Tanzanie) et l’Afrique du Sud entre 6,5 et 1 Ma.
Ils sont classiquement décrits sous deux formes : une gracile (Australopithecus africanus) et une plus
robuste (Australopithecus robustus et boisei). La réalité est sans doute plus complexe, comme en témoignent
les découvertes les plus révolutionnaires faites en Afar (Éthiopie) dans des terrains âgés de 3 Ma et plus.
On distingue, en effet, actuellement quatre grandes espèces : A. afarensis, A. africanus, A. robustus et A.
boisei.
</h3>
<ul>« Australopithecus afarensis »</ul>
<p>
Les fossiles rapportés à cette espèce, créée en 1976, sont connus entre 2,8 et 3,8 Ma à Laetoli (Tanzanie)
et Hadar (Éthiopie). Des dizaines de pièces ont été recueillies lors de missions internationales de
l’I.A.R.E. (International Afar Research Expedition), dirigées par Y. Coppens, D. C. Johanson et M. Taieb,
et, en particulier, un squelette presque complet, bien connu sous le nom de Lucie.
Dans le matériel, les chercheurs avaient tout d’abord isolé deux genres : Australopithecus et Homo, ce qui
semblait confirmer les découvertes effectuées par Mary Leakey à Laetoli (Tanzanie) dans des couches datées
de 3,6 Ma. Mais l’étude minutieuse des maxillaires et des dents a révélé qu’il n’y aurait probablement qu’un
seul genre et une seule espèce présents à cette date dans les gisements est-africains : Australopithecus
afarensis. Cette espèce se caractériserait notamment par des caractères individuels variables, sans doute
liés au sexe (pour la taille, par exemple). Mais, depuis son baptême, cette nouvelle espèce a suscité bien
des controverses, et certains auteurs reprennent l’hypothèse de l’existence de deux genres.
Signalons, cependant, les principaux traits qui la caractérisent : incisives centrales supérieures très
grandes et latérales petites, première prémolaire inférieure monocuspide et non sectoriale, persistance d’un
diastème entre l’incisive latérale et la canine supérieures et entre la canine et la première prémolaire
inférieures, mandibule présentant une forme de V, palais peu profond, face massive et projetée vers l’avant.
Par ailleurs, la taille d’A. afarensis varie entre 1 m et 1,10 m, et ses membres inférieurs sont un peu plus
courts que les nôtres.
Comme les autres Australopithèques, ils sont bipèdes (les traces de pas découvertes en 1976 à Laetoli en
Tanzanie en témoignent) : le gros orteil est parallèle aux autres doigts de pied, et la courbe de la voûte
plantaire semble importante. Cependant, les études portant sur les os post-crâniens montrent que cette
bipédie n’atteint pas la perfection de la nôtre, et un certain degré d’arboricolisme subsiste encore, selon
plusieurs auteurs.
Cette première espèce a été reconnue comme ancestrale aux Homo habilis d’une part, et autres espèces
d’Australopithèques d’autre part, (D. C. Johanson et T. D. White, 1981) ; d’autres auteurs (P. V. Tobias)
considèrent Australopithecus afarensis comme une sous-espèce d’Australopithecus africanus, elle-même ancêtre
des Australopithecus boisei et robustus et des Homo habilis. Quant à Y. Coppens (1980), il pense que les
caractères d’Australopithecus afarensis sont très spécialisés, et à ce titre les pièces mériteraient d’être
placées dans un genre à part, pré-Australopithecus (cf. figure).
</p>
<ul>Les autres Australopithèques</ul>
<p>
Caractérisés par une capacité crânienne avoisinant 500 cm3 en moyenne, la face des autres Australopithèques
est concave, les os de la voûte du crâne peu épais ; les orbites sont surmontées d’un bourrelet
sus-orbitaire continu, le trou occipital est déplacé vers l’avant, la crête nuchale plus ou moins forte, la
cavité glénoïde peu profonde. Les mâchoires sont massives et le menton fuyant. La première prémolaire est
bicuspide, et les dents jugales (prémolaires et molaires) sont plutôt massives ; la taille des molaires de
la première à la troisième s’accroît.
Australopithecus africanus est connu dès 3 Ma en Afrique du Sud (gisements de Sterkfontein, Makapansgat,
Taung) et on le retrouve en Afrique de l’Est (Éthiopie, Kenya). De faible capacité crânienne (440 cm3 en
moyenne), il présente des superstructures crâniennes faibles, un arrière-crâne plutôt arrondi, la crête
sagittale est généralement absente, la symphyse mentonnière montre un plan alvéolaire, les dents antérieures
(incisives et canines) se développent, et l’ensemble prémolaire-molaire tend à se réduire. Il serait déjà un
peu omnivore. Sa taille avoisine 1,20 m et son poids 20 à 30 kg.
Australopithecus boisei et Australopithecus robustus représentent les espèces dites « robustes » : l’une est
sud-africaine, A. robustus (gisements de Swartkrans, Kromdraai) et l’autre est-africaine, A. boisei
(Éthiopie, Kenya, Tanzanie). Leur capacité crânienne est en moyenne de 500 cm3 ; le front est très fuyant et
le bourrelet sus-orbitaire fort. Les superstructures sont d’ailleurs fortement exprimées, mais elles varient
avec le sexe (en particulier, la crête sagittale n’existe pas chez la femelle). La crête nuchale est forte
et la base du crâne plutôt courte. Les mâchoires sont extrêmement robustes ; les dents frontales (incisives
et canines) sont petites et les dents jugales énormes. Ils seraient plus végétariens et se nourriraient
probablement de racines et de rhizomes.
Pour l’outillage, peu de restes peuvent être définitivement associés aux Australopithèques. Néanmoins, des
galets aménagés vieux de 2,5 Ma sont connus à Hadar (Éthiopie), et un chopper (galet aménagé percuté sur une
seule face) latéral biface fut découvert sur le site Omo 71 (Éthiopie) dans des couches datées de 2,3 Ma.
Des petits éclats de quartz retouchés de 3 cm de longueur moyenne complètent le tableau de ce faciès, appelé
shungurien (de la formation de Shungura des gisements de la vallée de l’Omo). Par ailleurs, une véritable
industrie manufacturée à partir d’os, de dents et de cornes (ostéodontokératique) a été mise au jour à
Makapansgat (Afrique du Sud) et peut-être à l’Est Turkana (Kenya) ; elle est cependant discutée.
Les données de la faune et de la flore ont établi clairement un changement d’un milieu plus humide à un
milieu moins humide entre 4 et 2 Ma. En effet, on peut mettre en évidence, vers 4 Ma, un milieu de forêts et
de savane épaisse ; et vers 2,5 Ma, un assèchement brusque survient (il est particulièrement sensible dans
la région de l’Omo) ; la savane devient plus clairsemée. C’est à cette époque qu’Homo habilis entre en
scène.
</p>
<li>Le genre « Homo »</li>
<ul>« Homo habilis »</ul>
<p>
L’assèchement du climat paraît coïncider aussi avec l’arrivée du premier homme véritable, Homo habilis .
Cette espèce, très discutée, semble être reconnue maintenant par la majorité des paléo-anthropologues. On la
trouve en Afrique de l’Est, au Kenya (le crâne 1470, très connu, des gisements de l’Est Turkana n’est plus à
présenter), en Éthiopie et en Tanzanie ; il a été découvert également en Afrique du Sud en 1976.
Son âge ? 2 Ma sûrement, mais il pourrait être présent en Afrique orientale (dès 4 Ma à Kanapoi au Kenya,
vers 3 Ma à Hadar en Éthiopie). Sa capacité crânienne varie de 500 à 800 cm3 ; la voûte crânienne s’allonge,
et la région de l’occipital s’arrondit ; le bourrelet sus-orbitaire existe, mais il est plus faible que chez
ses prédécesseurs ; la face réduite en hauteur et en largeur s’aplatit, le palais est assez profond ; les
mâchoires sont moins massives que chez les Australopithèques et la dentition définitivement orientée vers un
régime omnivore ; les canines croissent en taille, et les dents jugales sont plutôt étroites et longues.
L’industrie se développe et se diversifie de plus en plus. L’Oldowayen serait probablement associé à Homo
habilis à Olduvai (Tanzanie), ainsi que l’industrie K.B.S. (trouvée sur le Kay-Behrensmeyer Site), dans
l’Est Turkana. Les premières traces de campements sont trouvées à Olduvai. L’organisation sociale devient
probablement plus complexe. L’environnement est peu différent de celui des Australopithèques : il s’agit
d’une savane plus ou moins arborée.
</p>
<ul>« Homo erectus »</ul>
<p>
Découvert tout d’abord à Java (Pithécanthrope) à la fin du siècle dernier, puis en Chine (Sinanthrope) entre
les années 1921 et 1937, Homo erectus semblait être exclusivement asiatique ; mais les fouilles plus
récentes (1954) en Afrique du Nord (Atlanthrope), puis celles de Tanzanie, du Tchad, du Kenya, d’Éthiopie et
même d’Europe prouvent bien que cet individu a colonisé tout l’Ancien Monde. Les conceptions traditionnelles
concernant son histoire doivent donc être révisées.
Les plus anciens de ces hommes se rencontrent en Asie et en Afrique de l’Est : on date actuellement les
dents trouvées en Chine dans le Yunnan de 1,7 Ma et on propose un âge de 1,6 Ma pour les fossiles de l’Est
Turkana au Kenya. En Afrique du Nord, il est plus récent (700 000 ans), et on le retrouve en Europe
notamment vers 700 000 ans en Allemagne (Mauer) et vers 450 000 en France à Tautavel.
Sa capacité crânienne varie de 780 à 1225 cm3 ; le crâne est long et bas, les os de la voûte crânienne
s’épaississent ; le front est fuyant, le bourrelet sus-orbitaire fort (on parle même de visière chez les
Pithécanthropes), une carène sagittale est souvent présente, des lignes courbes temporales bien
individualisées chez un certain nombre de spécimens ; la cavité glénoïde est courte et profonde ; la région
occipitale très anguleuse, le torus occipital fort, le menton absent ou légèrement ébauché. La denture est
proche de celle de l’homme moderne, mais les dents sont en général plus grandes. Le squelette post-crânien
est peu différent du nôtre.
C’est l’Acheuléen qui semble le faciès le plus répandu associé à Homo erectus. Il se compose principalement
de bifaces et de hachereaux. Il est connu entre 1,5 Ma et 200 000 ans. L’organisation de camps est
clairement établie à Melka Kunturé (Éthiopie) ; on y trouve par exemple des sites de boucherie et un atelier
de taille de pierres.
L’Homo erectus semble avoir vécu dans des milieux variés : équatorial fermé et humide à Java, proche d’une
steppe tempérée à Zhoukoudian ; dans un climat plus sec ou aride prolongé au Maghreb ; dans des paysages de
savane, avec des épisodes plus secs en Afrique de l’Est.
Les foyers, œuvres des Homo erectus, apparaissent vers 800 000 ans (grotte de l’Escale dans les
Bouches-du-Rhône) mais les plus importants restent sans conteste ceux de Zhoukoudian vieux de 350 000 à 400
000 ans.
C’est avec Homo erectus qu’apparaît une technique particulière de taille de la pierre : le débitage
Levallois. L’homme ne se contente plus de retailler le galet, mais il prévoit la forme qu’il va donner à son
outillage. Des bris intentionnels de crânes dont on découvre les calottes à Java, en Chine et en Tanzanie
témoignent peut-être de premiers « rituels ». Le crâne du site de Bodo (Éthiopie), par ailleurs, porte de
nombreuses marques probablement dues à l’action d’outils en pierre très tranchants. Ces observations ont
conduit certains auteurs à envisager l’hypothèse que cet homme fossile avait été scalpé.
Entre 1,8 Ma et 700 000 ans en Europe, aucun reste humain n’est présent ; par contre, nous connaissons
relativement bien de nombreux campements et des restes d’industries (Chilhac, Blassac, Soleihac, en
Haute-Loire, par exemple).
Ces Homo erectus ont donné probablement naissance aux Homo sapiens connus sous deux formes : Homo sapiens
neanderthalensis et Homo sapiens sapiens. Jusque dans les années soixante, on considérait encore qu’Homo
erectus avait évolué en Europe suivant deux lignées qui aboutissaient l’une aux Néandertaliens (lignée des «
Prénéandertaliens ») et l’autre à l’homme moderne (lignée des « Présapiens »). On pensait que les pièces
classées dans les groupes des Présapiens (celle de Swanscombe en Grande-Bretagne, par exemple) présentaient
des caractères plus modernes que les Prénéandertaliens. Mais l’étude détaillée de certaines régions
crâniennes (comme celle de la région occipitale) et des découvertes comme celles de Bilzingsleben en
Allemagne de l’Est (1972, 1974) ou de Biache-Saint-Vaast dans le Pas-de-Calais (1976) vinrent remettre en
question cette théorie et suggèrent une autre hypothèse. Le crâne de Biache-Saint-Vaast possède ainsi, sans
conteste, des caractères proches de ceux de la calotte crânienne de Swanscombe (les profils sagittaux se
superposent, les reliefs occipitaux sont semblables) et d’autres caractères typiquement néandertaliens
(étirement du crâne dans la région postérieure, contour transversal montrant des parois fortement convexes)
; il aurait pu constituer un très bon intermédiaire morphologique entre les deux formes.
Mais les découvertes ultérieures ont finalement conduit à l’abandon pur et simple du type « Présapiens » au
profit de la lignée des Prénéandertaliens.
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<ul>« Homo sapiens neanderthalensis »</ul>
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Connus dès 80 000 ans et jusque vers 35 000 ans en Europe occidentale (La Chapelle aux Saints en Corrèze, La
Ferrassie en Dordogne, La Quina en Charente, le Mont Circé en Italie et Gibraltar...), les hommes de
Néandertal migrent vers le Proche-Orient où leur présence est attestée à Tabun (Israël), Shanidar (Irak).
Ils se caractérisent par les traits suivants : leur front est toujours fuyant, le crâne allongé, l’occipital
présente un chignon, les os malaires sont fuyants vers l’arrière donnant à la face un aspect en museau (la
fosse canine n’existe pas), le bourrelet sus-orbitaire saillant ; la face est haute et saillante,
l’ouverture nasale large, la capacité crânienne peut atteindre des valeurs élevées (1 700 cm3), mais elle ne
dépasse pas en moyenne la variation observée chez l’homme moderne. La symphyse mentonnière est droite ou
fuyante et le crâne fortement pneumatisé comme en témoigne le développement des sinus frontaux et
maxillaires.
Le Moustérien est l’industrie associée le plus souvent à l’homme de Néandertal. Il s’agit principalement
d’industries sur éclats et le débitage Levallois est fréquent. Les Néandertaliens sont les premiers hommes à
enterrer leurs morts ; on retrouve de nombreuses sépultures à la fois humaines (La Ferrassie en France,
Shanidar en Irak, par exemple), témoignant peut-être d’une simple reconnaissance de l’individualité, et
animales (Drachenloch en Suisse, Le Regourdou en France). Par ailleurs, certains restes font penser à des
pratiques anthropophages comme à l’Hortus (France) ou à Krapina (Croatie).
À l’époque où vivaient ces hommes, le climat, jusqu’alors tempéré, devint froid. Les glaces envahirent une
grande partie de l’Europe ; la forêt disparut pour laisser la place à de grande steppes. Les mammouths, les
rhinocéros laineux firent leur apparition ; chamois, rennes, bouquetins, ours des cavernes caractérisent
cette faune de grand froid.
<li class="paragraphe_homo-sapiens">
Les Néandertaliens se sont éteints vers 35 000 ans pour des causes encore inconnues. Ces hommes anciens
ont côtoyé des hommes modernes, et certains indices laissent penser qu’il a pu se produire un métissage
entre deux sous-espèces : c’est le cas de l’un des crânes de Skühl en Israël et d’un frontal découvert à
Hanöfersand en Allemagne de l’Ouest, qui présentent en quelque sorte un mélange de caractères
néandertaliens et modernes.
</li>
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<ul>« Homo sapiens sapiens »</ul>
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Contemporaine de l’Homo sapiens neanderthalensis apparaît une population de type moderne au Proche-Orient
vers 50 000 ans. On la connaît maintenant parfaitement bien à Qafzeh et à Skhül en Israël. Comparées à Homo
sapiens sapiens, les pièces d’Israël présentent un certain nombre de caractères communs : il s’agit, en
particulier, de la forme des orbites et surtout de la ressemblance frappante entre les profils sagittaux des
crânes. Le crâne est plutôt arrondi, le front redressé, la fosse canine est présente, et l’aspect en museau
n’existe plus. La face est plus droite ou orthognathe ; la capacité crânienne varie de 1 000 à 2 000 cm3 ;
le menton est présent. De plus, le squelette post-crânien présente toute une série de caractères similaires.
Les formes d’Israël (Qafzeh et Skhül) peuvent donc être considérées comme des Proto-Cro-Magnon. On peut
signaler, en effet, que cet Homo sapiens sapiens, qui était apparu au Proche-Orient, a migré en Europe pour
donner naissance aux hommes de Cro-Magnon, dont nous sommes pour le moment les derniers descendants.
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<p>
À propos des relations Homo erectus et Homo sapiens sapiens, les pièces fossiles nous manquent pour
expliquer le passage d’une forme à l’autre. L’Asie serait peut-être un bon candidat à cette transformation.
La taille de la pierre est de plus en plus précise et fine ; l’os et l’ivoire sont sculptés et taillés
(aiguilles à chas, harpons, vénus). Certains rites poussent ces hommes à fréquenter les cavernes (Lascaux,
Pech-Merle) pour y peindre des représentations symboliques.
L’Homme s’établit vers 8 000 ans avant notre ère au Proche-Orient (Israël, Syrie) où il développe
l’agriculture, l’élevage, la poterie et le polissage de la pierre, puis, plus tard, le commerce. Enfin, vers
3 500 ans, il invente l’écriture. C’est à ce moment que l’Homme entre dans l’histoire.
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<li class="paragraphe_homo-sapiens">
Homo sapiens sapiens est le type humain aujourd’hui répandu dans le monde entier, qu’il peuple depuis 40 000
ans. Il s’est adapté à tous les climats, toutes les latitudes et longitudes et se caractérise par sa grande
diversité physique et culturelle. Il représente une belle réussite d’adaptation biologique.
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</ol>
</body>
</html>